Vers une obligation de mise en concurrence et de publicité en cas de vente d'un immeuble de son domaine privé par une collectivité territoriale ?

Vers une obligation de mise en concurrence et de publicité en cas de vente d'un immeuble de son domaine privé par une collectivité territoriale ?

Publié le : 02/07/2019 02 juillet juil. 07 2019

En l'état du droit applicable, il n'existe pas d'obligation de publicité et de mise en concurrence préalables à respecter pour une collectivité territoriale qui vend un immeuble de son domaine privé.
 
En effet, une telle obligation ne porte que sur les biens appartenant à son domaine public ou sur les biens appartenant au domaine privé de l'Etat (article R. 129 et suivants du code du domaine de l'Etat).
 
Pour autant, il n'est pas impossible que cette situation évolue vers l’obligation d'une publicité et d'une mise en concurrence préalables.
 
En effet, une réponse ministérielle du 29 janvier 2019 indique que, parce que le droit de l’Union Européenne est indifférent à la notion de domanialité ( l’Union ne connaît pas la distinction domaine public – domaine privé), il faut regarder le caractère « rare » de la ressource occupée pour déterminer l’obligation ou non de publicité et de mise en concurrence préalables (CJUE 14 juillet 2016 PROMOIMPRESA : le juge de l’Union considère qu’une telle mise en concurrence s’impose si, en raison de la rareté de la ressource sollicitée, le nombre d’autorisations qu’il est possible d’octroyer s’avère limité).
 
Ainsi, ce ne serait que si le domaine privé sollicité s’avère limité et indispensable à l’activité envisagée qu’une publicité et une mise en concurrence préalables devraient être organisées ?
 
Si aucune disposition de droit interne n'impose de respecter une publicité et une mise en concurrence préalables pour la conclusion d’une vente d’un immeuble du domaine privé d’une collectivité territoriale, il est néanmoins permis de s'interroger, au regard des principes du droit communautaire et notamment des principes de non-discrimination et de libre concurrence, sur cette compatibilité du droit interne avec le droit communautaire.
 
En effet, l'aliénation d'un bien du domaine privé d'une collectivité territoriale pourrait être considérée comme conférant à l’acquéreur un avantage, portant atteinte à la concurrence sur un marché donné, pour peu que le bien acquis lui assure une situation de monopole ou de quasi-monopole (le Conseil d'Etat a tenu un raisonnement similaire à propos des autorisations conventionnelles d'occupation du domaine public dans l'arrêt de Section du 26 mars 1999, Société EDA).
 
En conclusion et sachant que les décisions de la CJUE s’imposent aux Etats membres, à l'occasion d'une opération immobilière portant sur un bien du domaine privé d'une collectivité publique autre que l'Etat, il pourra être prudent, à défaut de cadre juridique fixant les modalités d'une telle opération, d'organiser une publicité et une mise en concurrence minimales, afin de garantir aux acquéreurs éventuels la possibilité de présenter une offre.

J-Ph LACHAUME, Avocat associé, spécialisé en Droit public
 

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